Billets d’humeur

Eclairages sur la condamnation de policiers par le TGI de Bobigny

Alors que le débat public et politique s’enflamme suite à la condamnation prononcée le 10 décembre 2010 par le Tribunal correctionnel de BOBIGNY à l’encontre de plusieurs fonctionnaires de police pour la falsification de procès-verbaux, un membre de l’AJM veut apporter une autre perspective à cette discussion.

Il est assez rare pour un tribunal de prononcer contre quelqu’un qui commet une infraction pour la première fois, une peine d’emprisonnement ferme. La loi prévoit en effet un éventail de sanctions allant du travail d’intérêt général à la peine d’amende, en passant par la sanction-réparation ou diverses interdictions et suspensions de droits. Quand une peine d’emprisonnement est prononcée, elle est généralement assortie d’un sursis simple, signifiant que la peine ne sera pas exécutée sauf au condamné de commettre un nouveau délit dans un délai de cinq ans, pour lequel l’emprisonnement ferme serait cette fois ordonné. Le tribunal peut encore décider d’assortir la peine d’un sursis avec mise à l’épreuve, signifiant que dans un délai pouvant aller jusque trois ans, le respect de certaines obligations, comme celle de travailler ou de suivre des soins, sera contrôlé par un juge de l’application des peines, lequel pourrait mettre à exécution la peine en cas de non-respect.

Dès lors, c’est dans des circonstances très particulières qu’une juridiction décide de prononcer une peine d’emprisonnement ferme à l’encontre d’un primo-délinquant : le plus souvent, il s’agira d’une agression sexuelle grave, ou d’une infraction ayant entraîné la mort de la victime. On considère en fait que l’atteinte à l’ordre public a été tellement grave, que la réinsertion ne pourra intervenir qu’au terme d’une première période de punition.

En conséquence, voir condamnés des fonctionnaires de police à des peines aussi sévères, alors que par définition ils ont un casier judiciaire vierge, et qu’en apparence ils n’ont porté atteinte à personne, peut sans doute surprendre, mais il ne saurait être affirmé de manière péremptoire que cette décision est "disproportionnée", et en tout état de cause, elle n’est en aucun cas "scandaleuse".

Il a été reproché aux policiers d’avoir établi un faux procès-verbal. Or, toutes les procédures judiciaires présentées devant un tribunal reposent sur des procès-verbaux établis par des fonctionnaires de police, qu’ils soient sous la direction d’un juge d’instruction ou du ministère public, voire à leur initiative avant qu’il n’en soit rendu compte. Cela signifie que tout procès a lieu sur la foi de ces actes, qui soit font état de constatations sur les lieux, soit reprennent les déclarations faites par les mis-en-cause, les victimes ou les témoins lors d’interrogatoires. Dès lors, établir un faux procès-verbal, c’est non seulement porter atteinte à celui que l’on vise dans cet acte (en l’espèce, il a été rapporté que le mis en cause aurait encouru une peine de réclusion criminelle à perpétuité), mais c’est encore et surtout porter atteinte à la confiance que l’on peut avoir dans toutes les procédures qui sont présentées devant une juridiction.

En effet, les procès-verbaux ont une valeur supérieure aux autres moyens de preuve, en ce qu’ils sont établis par des agents assermentés. Dès lors, si des fonctionnaires de police abusent de la foi que la loi prête à leurs actes, cela conduit à remettre en cause toutes les procédures judiciaires, partout en France. Ce n’est pas seulement porter atteinte à un homme injustement mis en cause, ce qui est déjà grave, mais c’est encore affaiblir tous les actes de police régulièrement établis, donc toute l’institution policière, et par là-même tout le système judiciaire.

Il est fréquent d’entendre à l’audience des prévenus contester le contenu des procès-verbaux. Parfois, la mauvaise foi est manifeste, en particulier quand les actes sont signés par eux, et la contestation sera écartée sans égard. Pourtant, il est des situations où l’apparente bonne foi du prévenu conduit à avoir un doute réel sur l’authenticité de l’acte, et ce n’est que parce qu’il a été rédigé par un agent assermenté qu’il prévaudra. De ce fait, qu’un fonctionnaire de police rompe ce serment pour établir un faux procès-verbal, et c’est l’ensemble des actes de police qui s’en trouvent fragilisés.

Loin de porter atteinte à la fonction policière, les condamnations prononcées par le Tribunal correctionnel de BOBIGNY visent à protéger l’institution judiciaire, et derrière elle, le travail de l’ensemble des agents de police qui, eux, continuent de respecter scrupuleusement le serment qu’ils ont prêté, dans des conditions toujours plus difficiles.

Jeune Magistrat

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Commentaires

1 Message

  1. Eclairages sur la condamnation de policiers par le TGI de Bobigny

    j’aime réellement le boulot accompli, un grand bravo.

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    par lpilo36 | 22 mai 2014, 13:53

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